Diabolisation, dédiabolisation et rediabolisation…

Diabolisation, dédiabolisation et rediabolisation…

Depuis la condamnation de Marine Le Pen, j’ai croisé plusieurs observateurs de la vie politique française qui me faisaient part de leur incompréhension.
Plus précisément de leur incompréhension devant l’inéligibilité de la candidate : pourquoi, demandaient-ils, torpiller la candidature de Marine Le Pen, si utile au « Système » ?
À cette question, je peux imaginer trois types de réponse.
Tout d’abord, ce que l’on appelle par facilité le « Système » (ou « l’État profond ») n’est pas une structure organisée.
Quelques milliers de dirigeants partagent certes une vision commune du monde – et cette vision est assez éloignée de celle du RN, ce qui explique largement l’hostilité que subit ce dernier.
Toutefois, ces personnes divergent aussi sur de multiples sujets – et, par conséquent, une partie de cet « État profond » pourrait être tentée de laisser le pouvoir au RN (tout en « l’encadrant », pour éviter qu’il nuise aux intérêts des puissants du jour), ne serait-ce que pour éviter l’élection de Jean-Luc Mélenchon.
Dans les couloirs du parlement, on dit que de plus en plus de hauts fonctionnaires se font à l’idée de cette arrivée du RN au pouvoi. Par conséquent, le « cordon sanitaire » semblant de moins en moins efficace, il a pu sembler utile à certains dirigeants de prévenir ce risque, en le « traitant » par une condamnation judiciaire.
Une deuxième réponse pourrait être que les juges, une fois saisis, n’obéissent plus à personne. On peut imaginer que certains politiciens aient voulu montrer par ce procès que le RN demeurait décidément « infréquentable » – mais que les juges aient été beaucoup plus loin que leurs « mandants ». D’autant que les parlementaires n’ont cessé de se défausser de leur pouvoir sur les juges qui seraient bien bêtes de n’en point profiter !
Enfin, une troisième réponse peut venir à l’esprit. D’un côté, on constate que la « dédiabolisation » ne fonctionne pas aussi bien que le souhaiteraient les dirigeants du RN (à chaque élection, le front républicain est réactivé avec une facilité déconcertante, y compris avec des gens qui, comme les élus LFI, assument publiquement leur idéologie totalitaire – dont le « front républicain » est censé nous protéger !).
Mais, d’un autre côté, cette « dédiabolisation » fonctionne tout de même : il ne reste plus beaucoup de Français à croire que Marine Le Pen mange des enfants au petit-déjeuner ou décorerait Paris de drapeaux à croix gammée en cas de victoire !
Or, la république, depuis ses origines, a besoin d’un diable (que ce soit le « contre-révolutionnaire » en 1793, le « clérical» en 1905, ou le « fasciste» après 1944). Jean-Marie Le Pen joua admirablement ce rôle de diable. Mais sa fille est un peu moins « convaincante » dans le personnage et certains ont pu penser qu’il serait opportun, pour éviter les « aventures » et conserver le pouvoir au « bloc central », de susciter un nouveau diable.
Éric Zemmour fut un temps un très acceptable candidat au rôle. Mais il pèse désormais trop peu électoralement. Alors pourquoi pas Jean-Luc Mélenchon ?
Bien sûr, ce que j’écris n’est qu’hypothèse, mais ce serait logique. Dans ce cas, le « front républicain » pourrait opposer tous les partis à LFI – qui conteste aussi vigoureusement son antisémitisme que Jean-Marie Le Pen dans les années 1980, mais les médias auraient davantage de raison qu’alors d’en brosser un tableau méphistophélique.
Inutile de dire que cet hypothétique changement de pied modifierait bien des choses dans le paysage politique – et permettrait notamment l’union des droites que nous appelons de nos vœux depuis longtemps.
Attendons la suite, mais les mois à venir vont être passionnants !

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