La béatification de Stéphane Hessel
Deux événements ces derniers jours, et les commentaires médiatiques qui les ont ont accompagné en France, m’ont semblé particulièrement significatifs de l’époque lamentable en laquelle nous sommes.
Le premier a été la démission du pape Benoît XVI, qui a quitté ses fonctions le 28 février au soir. Aux supputations et hypothèses concernant les raisons de cette démission se sont ajoutées les rumeurs les plus diverses concernant des manœuvres de l’ombre, un lobby homosexuel au sein du Vatican, et j’en passe. L’oeuvre de théologien qui fut celle de Benoît XVI, sous son nom, Joseph Ratzinger, n’a quasiment pas été évoquée, son action au cours de son pontificat l’a été à peine. Les humoristes politiquement correct s’en sont donnés à cœur joie et se sont, comme à leur habitude, autorisés concernant le catholicisme des plaisanteries salaces.
Au même moment, Stéphane Hessel est mort. Et là, le ton a été très différent. Aucune rumeur n’a été autorisée, aucun rappel de faits, pourtant fondés. Seule la biographie officielle du défunt a été autorisée, et oser s’en écarter d’une virgule, quand certains l’ont fait, a semblé relever du blasphème. Bien que l’oeuvre de Stéphane Hessel soit bien davantage que mince et infiniment plus qu’indigente, treize pages dignes d’un écolier besogneux, celle-ci a été commentée, louée, encensée, portée aux nues, y compris par des philosophes qui, pour la circonstance, se sont efforcés de trouver de l’intelligence et de la profondeur là où il n’y en a jamais eu. L’action de Stéphane Hessel, bien qu’inexistante, et déjà magnifiée par lui-même de son vivant (sur un mode qui relevait de l’imposture), s’est trouvée plus magnifiée encore. Faut-il le dire ? Aucun humoriste ne s’est autorisé à esquisser le moindre sourire.
En somme, le principal dignitaire de la religion qui a fondé, pour l’essentiel, les civilisations européennes et qui a donné son identité à l’Europe et au monde occidental, s’est trouvé avili et l’institution qu’il dirigeait s’est trouvée par la même occasion rabaissée, et, pour partie, diffamée. Un homme très largement insignifiant, qui a connu un inexplicable succès de librairie et qui parce qu’imprégné du vide politiquement correct est devenu l’inspirateur du vide politiquement correct, un homme qui incarne la défaite absolue de la pensée et l’effondrement éthique de l’Europe et du monde occidental, s’est lui, trouvé porté aux nues, et quasiment béatifié par radio, télévision et journaux interposés. On est même, supercherie ultime, allé jusqu’à lui rendre les honneurs militaires, lui qui n’a jamais rien eu à voir avec la chose militaire. Certains, emportés par leur exaltation sont allés jusqu’à proposer son entrée au Panthéon.
Époque lamentable, oui. Que le pape soit traité ainsi est logique, effroyablement logique. L’Europe aujourd’hui se déchristianise et se suicide économiquement, politiquement, culturellement, démographiquement. Que l’Église catholique soit elle-même traitée ainsi est tout aussi logique. De tous côtés, les défenseurs des valeurs judéo-chrétiennes sont ridiculisés, fustigés, violentés, traînés dans la boue. L’Europe est post-chrétienne. On pourrait dire qu’elle est post, tout court, et qu’elle appartient peu à peu au révolu. Que Stéphane Hessel ait été traité ces derniers jours comme il l’a été est logique encore. Sous le mot vide et trépignant d’ « indignation », il s’est fait le vecteur de la démolition en cours : tout en se présentant d’ascendance juive pour mieux légitimer ses affinités avec un certain antisémitisme, Hessel n’était pas juif. Il n’était pas chrétien non plus. Il se réclamait des valeurs de la Résistance dont il n’avait fait partie que marginalement, et ces valeurs étaient un fourre-tout du prêt-à-penser. Il se réclamait de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en s’en prétendant contributeur, ce qu’il n’a jamais été, et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme est, par excellence, un texte de compromis imprégné de « politiquement correct » : conçu pour être signé par le monde occidental comme par le monde soviétique. Hessel était vaguement anticapitaliste, comme tant de gens le sont avant de commencer à réfléchir. Il détestait Israël, ce qui lui a valu beaucoup d’amis frelatés. En le béatifiant, c’est tout ce qui conduit la France vers le naufrage final qui s’est trouvé béatifié. Ensuite, est venue une autre béatification, plus grave encore, bien sûr : celle de Hugo Chavez. J’en traiterai la semaine prochaine. Epoque lamentable, disais-je…
Comments (12)
Qu’est ce qu’un “vrai” juif?. Quelqu’un qui l’est réellement et non pas qui prétend l’être. Pour ce que j’en sais, la communauté ne reconnait comme juif que l’enfant d’une femme juive. Contrairement aux musulmans pour qui c’est la religion du père qui prime. En toute logique, il semble que les juifs aient raison aussi sur la sécurité de l’appartenance. Ne dit on pas “maman sur, papa peut être”? Voila j’espère avoir un peu (très peu) éclairé votre immense savoir devant lequel nous devons tous nous incliner. Maintenant que le type ait la nationalité iranienne ou israélienne, il reste juif. Comme un chrétien peut être lapon ou zoulou, c’est toujours un chrétien.
ah bon parce votre immense connaissance de l’âme humaine vous permet d’affirmer qu’un Lapon du Cercle Polaire et qu’un un Noir de Récif pratiquent un ” Christianisme ” identique ?
vous n’êtes jamais sorti de chez vous , vous ne lisez pas , ou bien alors vous êtes un habitué des croisières et autres voyages qu’on dit organisés ou bien encore un assidu *** du fauteuil télévisé !
*** un assis du fauteuil télévisé !
Selon Goldnadel, connu aux 4V, et qui lui est réellement juif, S. Hessel ne l’était pas . C’est aussi l’opinion de plusieurs “vrais” juifs que je connais. On peut quand même supposer que les gens de cette communauté savent qui est qui. Pour ma part, ne l’étant pas, je n’affirmerai rien, contrairement à d’autres. Hessel devait peut être penser qu’en se prétendant juif, il jouirait de plus de considération. Paix a ses cendres mais s’il doit avoir sa place au Panthéon comme le réclament certains gugus, alors la baraque ne sera pas assez grande car bien d’autres ont fait preuve de mérités supérieurs sans que l’on n’en fasse pas tout un plat, et ils y auraient alors leur place aussi, si l’on fait abstraction de l’idéologie.
qu’est ce qu’un ” VRAI ” Juif ?
un ” orthodoxe ” fanatique d’Israël ou un Juif iranien pour lequel l’Etat Israël est une offense à ce que Dieu ” a voulu et décidé pour le peuple Juif ” … l’errance jusqu’à la venue du Messie ?
si les ” 4V² ” deviennent un livre du pédigrée de tout un chacun où allons nous ?
Cela fait des années que je côtoie la pensée de Guy Millière, principalement sur les 4V. Il m’a parfois prodigieusement agacé par son optimisme excessif par rapport à tout ce qui nous vient d’Amérique; à d’autres moments au contraire j’ai été drolement heureux d’entendre sa voix par dessus le tumulte hystérique de l’anti-américanisme primaire et vulgaire qui est tellement bien de chez vous !!! Mais on ne va pas non plus se fendre d’un commentaire à chaque occase, n’est-ce pas ? (surtout quand on est fatigué de l’infernale répétition du pareil au même comme je le suis) ……
Mais ici, alors, OUI ! j’ai lu et entendu déja quelques commentaires – et non des moindres – dénonçant l’ignoble imposteur nommé HESSEL, mais je dois dire, Guy Millière, que le vôtre est le meilleur de tout ce que j’ai lu !!!
…. Et, encore une fois, je ne suis pas un de vos afficionados inconditionnels, mais vous avez(plus que jamais) ma sympathie car non seulement votre talent de polémiste est plus que jamais mis en valeur, mais tout ce que vous avez dit dans votre article est rigoureusement VRAI. N’en déplaise aux ronds-de-cuir de l’indignation prémâchée par l’idéologie style “Jaures”. (je dois dire que je n’ai pas encure lu sa réaction à votre article, mais je m’attends tout simplement au pire, et sans doute ne serai pas déçu).
Bien cordialement vôtre
pour votre ouverture au Monde , il vaut mieux côtoyer la pensée ( ? ) de Monsieur Millière que d’y plonger ( dans ) … croyez moi !
“Il se réclamait de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en s’en prétendant contributeur, ce qu’il n’a jamais été, » écrit Millière.
Il ignore visiblement qu’Hessel n’a jamais prétendu être rédacteur de la DUDH. Comme il l’écrit lui-même: “J’assistais aux séances et j’écoutais ce qu’on disait, mais je n’ai pas rédigé la déclaration. J’ai été témoin de cette période exceptionnelle.» Comment imaginer que des hommes comme René Cassin ou Henri Laugier auraient accepté à leurs côtés un imposteur antisémite ?
Et pour Millière une phrase comme «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.»(article 1 de la DUDH) n’est qu’un “fourre-tout prêt à penser”.
Qu’est-ce qui peut amener à écrire de telles choses ?
je n’ai pas lu l’article de Guy Millière et je ne le lirai pas ; je l’ai déjà lu des dizaines de fois … mais je sais que Hessel est à jeter aux chiens et cela pour TROIS raisons :
– la première est qu’il est allé apporter son soutient aux Gazaouis dans leurs camps de concentration
– la seconde est qu’il est envié par l’auteur de l’article : son opuscule s’étant vendu comme viennoiseries en kermess et sur toute la planète ce qui n’est certainement pas le cas des oeuvres maitresses de Guy Millière
– la troisième est qu’il était Juif et avait porté un avis accusateur sur Israël ( opération plomb durci , un petit remake moyen-oriental de Dresde ) et c’est cela qui lui est ( à Millière ) le plus intolérable
Eh oui ! Hessel avec un opuscule de quelques dizaines de pages a connu le succès (pas seulement en Europe !) et l’estime. D’autres avec un livre tous les 6 mois reçu dans l’indifférence restent d’illustres inconnus. C’est ainsi. On peut en quelques pages en dire plus sur l’époque qu’en 20 volumes. Question de lucidité.
Si Hessel ne fut que “marginalement” résistant, cela dut suffire aux nazis qui le déportèrent et le torturèrent.
Mais, c’est vrai, Hessel a toujours soutenu le peuple palestinien, ce qui pour Millière est définitivement rédhibitoire.
Quant à Benoit XVI, laissons aux catholiques le soin de juger de son pontificat.
Dès que le gouvernement socialiste de surcroit se sent obligé d’encenser un homme après son décès — ou de son vivant — on peut en toute conscience se poser des questions quant à sa réelle valeur humaine et intellectuelle. Dans le cas de S. Hessel tout le tumulte en son honneur s’avère beaucoup de bruit pour un homme ordinaire, de qualité intellectuelle médiocre et d’impact nul, mais quel bonheur pour lui, il était de gauche; cette simple qualification suffit à essayer d’en faire un personnage important alors qu’il était parfaitement inexistant de son vivant. Il est le symbole d’une société en déliquescence prête à attribuer des lettres de bravoure à tout ce qu’il y a de plus insignifiant. Cette descente a commencé avec la condamnation du Maréchal Pétain, s’est poursuivi avec l’assassinat d’hommes remarquables, de véritables héros comme J.M. Bastien Thiry , Degueldre, Dovecar, Pietg, N’oublions pas la réception extraordinaire réservée à Florence Cassez — alors qu’elle est surement coupable — quand les politiques ignoraient l’arrivée au même moment du soldat mort en faisant son devoir. Quelle honte pour la France de tomber si bas ! Oui, cette république sous bien des aspects me dégoute vraiment, me fait horreur !
La mise en regard de ces deux événements s’imposait dans les termes que vous avez employés : bravo pour cet article !
Je partage votre point de vue mis à part que Hessel fût un résistant et que cela ne peut être nié. Ceci ne lui donne pas tout les droits….