Nicolas Sarkozy et la justice
La condamnation de Nicolas Sarkozy à cinq ans de prison ferme (assortie d’une exécution provisoire de la peine) a fait couler beaucoup d’encre.
Et à juste titre : c’est en effet la première fois qu’un ancien président est condamné à de la prison ferme – et cette « première » est symptomatique de notre effondrement.
Cependant, les commentateurs ne prouvent rien à force de vouloir trop prouver et se partagent en deux chœurs opposés, l’un clamant l’innocence de l’ancien chef d’État, l’autre l’impartialité de la justice.
Malheureusement, il est tout à fait possible (et même assez vraisemblable) que les deux slogans soient aussi faux l’un que l’autre.
Commençons par Nicolas Sarkozy. Je n’ai évidemment aucun élément me permettant de conclure à sa culpabilité ou à son innocence, toutefois je note que le vrai scandale libyen de la présidence Sarkozy n’est pas le financement réel ou supposé de sa campagne électorale, mais l’instauration du chaos qui permet à un vaste marché aux esclaves de se tenir à quelques centaines de kilomètres des côtes européennes.
Par ailleurs, je doute qu’il soit possible de gagner une élection présidentielle en respectant le Code électoral. Là non plus, je n’ai aucun élément pour affirmer si Nicolas Sarkozy a violé ou non la loi électorale mais je rappelle que le plafond des dépenses, pour les candidats de 2e tour, est de l’ordre de 22 millions d’euros – et je ne vois absolument pas comment on peut mener une campagne victorieuse avec ce genre de budget (qui permet tout juste de financer une demi-douzaine de meetings importants).
Bref, je ne crois pas que Nicolas Sarkozy soit une innocente victime persécutée par des juges qui lui en voudraient sans raison.
Mais l’inverse n’est pas plus crédible. D’abord, on ne voit aucune raison à l’exécution provisoire de la peine – si ce n’est la volonté de puissance du juge.
Il est évident que Nicolas Sarkozy n’allait pas récidiver ni s’enfuir. Et, hormis ces deux cas, on ne voit pas bien à quoi pourrait bien servir cette exécution provisoire.
Il est par ailleurs curieux d’assumer tranquillement de condamner sans preuve. Et la condamnation même est étrange : Nicolas Sarkozy est relaxé des chefs de recel de détournement de fonds publics et de financement illégal de campagne, mais reconnu coupable d’association de malfaiteurs. Or, si association de malfaiteurs il y a eu dans cette affaire, c’était évidemment pour financer illégalement une campagne électorale : si le juge avait de quoi le condamner sur un chef d’inculpation, on s’étonne qu’il n’ait pas eu la matière pour les autres.
Le problème de fond est double. D’abord, la justice s’éloigne de plus en plus de la procédure inquisitoriale qui utilisait le débat contradictoire pour rechercher la vérité des faits. Désormais vous pouvez perdre en ayant raison et inversement. Vous pouvez même être condamné pour une arrière-pensée sans aucune conséquence sur les faits.
Ensuite, la justice est politisée. Après François Fillon et Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy en fait les frais à son tour. Mais, bien avant eux, le « mur des cons » – où figuraient même des parents de victimes ! – avait montré que l’institution judiciaire n’était plus entièrement dévouée à la défense du bien commun, mais qu’une partie de ses membres défendaient prioritairement une idéologie (d’extrême gauche).
Si les politiciens et les magistrats eux-mêmes ne prennent pas ce problème à bras-le-corps, il y a fort à craindre qu’il se « règle » dans le sang.
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