Politique extérieure : une fuite en avant

Politique extérieure : une fuite en avant

L’adage « heureux comme Dieu en France » renvoyait jadis à l’idée d’un pays offrant liberté, dignité et sécurité, au point d’en faire un symbole jusque dans le monde germanophone et yiddish.

Ce tableau flatteur contraste aujourd’hui avec une politique étrangère qui, loin de protéger nos intérêts, paraît les sacrifier à des postures idéologiques.​

Ukraine : du conflit interne

à la guerre totale

Le conflit ukrainien ne naît pas en 2014, mais s’enracine dans une opposition ancienne entre courants conservateurs et élites progressistes, encouragés par une partie des gouvernements occidentaux. Les opérations initialement présentées comme des mesures de « maintien de l’ordre » dans l’Est russophone ont été rapidement qualifiées d’agression unilatérale, sans que soient vraiment exposées les responsabilités partagées des protagonistes. Dans nos médias, les acteurs les plus exposés sur les plateaux – souvent à l’abri en France – défendent une escalade militaire dont ils ne subiront jamais directement les conséquences.

L’UE, la Russie et l’énergie

L’Union européenne s’est construite sur un socle culturel largement judéo-chrétien, même si ce point reste discuté dans les textes officiels. Elle s’expose pourtant au risque d’un double effacement : stratégique, par sa dépendance énergétique, et identitaire, par une gestion mal maîtrisée des flux migratoires. Sur le plan énergétique, la Russie reste un fournisseur majeur de gaz, de pétrole et d’uranium, tandis que l’UE cherche à réduire cette dépendance au prix de sanctions dont l’impact économique est lourd des deux côtés. Plutôt qu’une confrontation stérile, il serait rationnel de privilégier une coopération énergétique et scientifique avec la Russie, dans le cadre d’une « Europe des Nations » fondée sur des souverainetés nationales fortes et des projets communs ciblés.​

Mémoire coloniale

et diplomatie africaine

La France oscille entre dénonciation morale de sa propre histoire coloniale et volonté de conserver une influence en Afrique. Qualifier globalement la colonisation de « crime contre l’humanité » tout en recherchant la bienveillance de peuples convaincus d’avoir été exploités installe une contradiction difficilement tenable. Ce discours culpabilisateur fragilise la position française dans un continent où de nouveaux acteurs, comme la Russie ou la Chine, proposent des partenariats perçus comme moins moralisateurs.​

Russie, Chine et BRICS :

un réalignement ignoré

La diabolisation systématique de la Russie occulte un fait central : pousser Moscou dans les bras de Pékin renforce un bloc eurasiatique déjà structuré autour des BRICS, en pleine phase d’élargissement et de consolidation. Ces pays développent des instruments financiers alternatifs et des coopérations sectorielles (infrastructures, énergie, technologies) qui contestent la centralité occidentale. Agiter en permanence l’analogie hitlérienne à propos du pouvoir russe, dans un contexte nucléaire, relève plus de la rhétorique anxiogène que de la prudence stratégique.​

États-Unis, Trump

et suivisme européen

Le traitement médiatique de Donald Trump, accusé d’« imprévisibilité » et d’« indignité », illustre la tendance des élites européennes à disqualifier tout dirigeant qui ne s’aligne pas sur le consensus transatlantique. Or, derrière les anathèmes, la question centrale demeure : l’Europe défend-elle ses propres intérêts, ou se contente-t-elle d’accompagner les priorités de Washington, quel que soit le locataire de la Maison-Blanche ?​

Au total, une politique étrangère fondée sur les postures morales, la culpabilité historique et le suivisme stratégique finit par affaiblir la France comme l’Union européenne.

Faute de redéfinir clairement nos intérêts, nos alliances et notre modèle de coopération européenne, nous risquons de connaître l’une des périodes les plus désastreuses de notre histoire diplomatique.

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