Se soumettre ou se démettre

Se soumettre ou se démettre

On dit que l’Histoire ne se répète pas. Pourtant, il se pourrait que nous assistions en France, d’ici quelque temps, à une réédition du passé à la suite des prochaines élections législatives. Celles-ci devraient porter au pouvoir une majorité de droite patriote RN-LR, en opposition forte au chef de l’État et impliquer une cohabitation, de nature, dès lors, à se conclure de manière anticipée par l’éviction de l’une des parties. Il y a dans notre histoire tourmentée un précédent célèbre.
Après la chute du Second Empire en septembre 1870, notre pays est entré dans une période d’incertitude. En effet, compte tenu des forces politiques en présence, dont un fort parti monarchiste, pendant plusieurs années, la France a hésité entre la République et le retour à la monarchie. En 1873, après la défection du chef des monarchistes, une solution d’attente a été trouvée avec l’investiture du maréchal de Mac Mahon, lui aussi monarchiste, à la tête de l’exécutif pour 7 ans. Puis, au fil du temps, les idées républicaines progressant dans l’opinion, le rapport de force politique s’est infléchi en faveur de ce camp. Mac Mahon s’est donc, en 1877, trouvé dans l’impossibilité de gouverner. D’où l’ultimatum de Gambetta à son endroit adressé dans l’hypothèse où les républicains finiraient par s’imposer électoralement : « Il faudra se soumettre ou se démettre. » Ce à quoi, après le succès des républicains aux élections d’octobre 1877, l’intéressé dut se résoudre.
Cet antagonisme entre deux blocs n’est pas sans correspondre au contexte actuel de notre pays. Que va-t-il se passer à partir du 7 juillet prochain ? Comment va se dérouler la cohabitation qui va se mettre en place à cette date ? La personnalité retorse et clivante du chef de l’État laisse augurer d’une cohabitation conflictuelle, notamment en matière de politique étrangère. Le président – comme ses devanciers, Mitterrand et Chirac – devra partager son pouvoir en la matière – exercé jusqu’ici jalousement (je renvoie ici à mon article du n° 1437) et alors que les positions du bloc patriote sont en opposition marquée aux siennes sur le dossier ukrainien et sur l’UE. Difficile de n’être plus Jupiter !
À l’instar de Mitterrand en 86-88, Macron va sans doute tenter de reprendre graduellement des points dans l’opinion publique, guettant les premières occasions d’accuser le gouvernement d’amateurisme. Toutefois, il part dans l’opinion avec le handicap d’un fort rejet. La remontada, c’est pas gagné ! Par ailleurs, il y a urgence à agir sur des dossiers brûlants (immigration, sécurité, économie, finances publiques, etc.) laissés en jachère. On ne voit pas le président refuser, comme le fit Mitterrand en 86, de signer des ordonnances sur ces sujets pour retarder l’action du gouvernement. Ce dilatoire l’exposerait à l’accusation de recherche de la politique du pire. Hasardeux dans le contexte tendu actuel et désastreux aux yeux de l’opinion. Il s’ensuit que le rapport de force politique pourrait continuer d’être de manière persistante en défaveur de l’hôte de l’Élysée, celui-ci étant acculé à l’attentisme. Les Français seraient amenés à penser de plus en plus fort que ce système boiteux ne doit pas perdurer et qu’il convient de tourner la page de la macronie.

Partager cette publication

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *