Travailler plus ou travailler autrement ?​

Travailler plus ou travailler autrement ?​

La philosophie du travail oscille encore entre le « métro-boulot-dodo » et le sinistre « le travail rend libre » des camps nazis, comme si l’effort devait se mesurer au nombre d’heures et non au résultat obtenu.

Or, ni les responsables politiques ni une partie des médias ne semblent intégrer sérieusement les progrès techniques, l’allongement de l’espérance de vie et l’évolution des aspirations au cours d’une existence.

Le chômage reste sous-estimé ou maquillé, alors que toutes les professions sont concernées, des médecins qui choisissent le temps partiel jusqu’aux enseignants dont la charge se transforme plutôt qu’elle ne disparaît.​

Dans le passé, des élèves passaient trois heures sur une version latine ou grecque corrigée selon un barème implacable ; aujourd’hui, l’intelligence artificielle traduit le même texte en quelques minutes avec une qualité souvent supérieure.

Dans presque tous les domaines fondés sur le raisonnement, l’IA permet déjà d’obtenir de meilleurs résultats en un temps très court, ce qui devrait nous conduire à revoir ce que l’on appelle « travailler ».

En physique, le travail d’une force est le produit de cette force par le déplacement : celui qui monte au sommet du Mont-Blanc et redescend à Chamonix n’a, au sens strict, accompli aucun travail puisqu’il revient à son point de départ ; seule compte la différence entre la situation initiale et la situation finale.​

Appliquée à l’économie, cette idée oblige à distinguer l’activité utile de l’agitation stérile.

Les économistes prennent souvent l’image d’une équipe qui creuse un trou et d’une autre qui le rebouche : beaucoup d’emplois relèvent de cette logique lorsqu’une hyper-administration complique à l’excès impôts et taxes au lieu de les simplifier. L’emploi ne devrait plus être le « totem » avancé à chaque discours mais la conséquence d’une production réellement nécessaire, ajustée à la consommation et à la productivité qu’autorise la technologie.​

C’est là que se joue la différence entre une économie libérale et les modèles socialistes à la soviétique, qui privilégiaient le plein-emploi statistique au détriment de l’efficacité réelle.

Parmi les pistes libérales, le revenu universel imposable occupe une place centrale : il peut devenir un facteur d’équité, de stabilité et de liberté en sécurisant le socle de revenus tout en laissant chacun développer du travail pour soi, sa famille ou des projets choisis.

Dès les années 1950, des économistes annonçaient qu’une vie professionnelle impliquerait plusieurs métiers et une formation continue ; cette prophétie se réalise sous nos yeux.​

La question n’est donc plus « travailler plus » mais « travailler mieux et autrement ». Gagner davantage sans se tuer à la tâche devient possible si l’on accepte de mettre la technologie – notamment l’intelligence artificielle – au service de la valeur produite, plutôt que de défendre à tout prix des structures d’emploi dépassées.

Il appartient désormais au débat public de sortir des slogans pour repenser le couple travail – revenu à l’aune des outils du XXIe siècle.

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