Les universités ne sont pas des parkings

Les universités ne sont pas des parkings

La crise des universités en France est très ancienne. Déjà, François Ier constatait une certaine sclérose et créa le Collège de France, lointain ancêtre du CNRS. Certains, pendant la Révolution, voulurent le détruire. Puis Napoléon créa une structure éducationnelle très rigide, de l’école primaire aux « grandes écoles », telles Polytechnique ou l’École Normale Supérieur.

À l’université, segmentée en facultés totalement séparées, incombait la formation des juristes (juges, avocats…) des médecins et des professeurs de lycées (lettres et sciences).

Tout cela était peu favorable à la libre recherche et à l’esprit d’initiative, mais fut encore aggravé par l’instauration de réformes, comme la création de l’agrégation et de la « licence d’enseignement ». Toutefois, ce système sclérosant fut sauvé partiellement par la qualité de l’enseignement de certains professeurs et de rares ministres, tel Victor Duruy.

Néanmoins, le système, en 1945, était à bout de souffle, car déjà les universités étaient encombrées par des bacheliers incapables d’accéder avec profit à l’enseignement supérieur. D’où, pendant deux décennies, une série de petites réformes peu efficaces. On a souvent reproché à Edgar Faure d’avoir, par sa loi, amené un grand désordre dans les universités. Beaucoup de choses dans cette réforme étaient bonnes, notamment l’éclatement des archaïques facultés.
Son défaut a été de ne pas avoir transformé la totalité du système éducatif. Ainsi, il y a eu, à partir de 1930, un déclin de l’enseignement secondaire dû à diverses raisons qui explique ce qui arriva vers 1945 dans le supérieur. Ajoutons à cela l’acceptation fréquente d’idées dangereuses telles celles formulées dans le rapport Langevin-Wallon.

Une autre, extraordinaire, apparut dans certains milieux, notamment de « cadres supérieurs » : il aurait fallu 80 % des bacheliers pour avoir une main-d’œuvre formée, dynamique et nécessaire à la modernité. Ce qui, d’ailleurs, sous-entend qu’on se désintéresse du 20 % restant. Esprit étroit et rigide, Jospin accepta le principe et le résultat global n’est pas triomphal. Aujourd’hui, on parle de la nécessaire démocratisation de l’enseignement supérieur, sans parler, bien sûr, de supprimer les très rigides concours, ni proposer le libre accès de tous à l’École polytechnique !

La vérité, c’est qu’il y a actuellement trop d’étudiants, car très nombreux sont ceux qui ne restent inscrits qu’une année ou deux sans en tirer d’autre avantage que de se dire Bac+2. Il résulte de cet état de chose bien des inconvénients. Ainsi, un très nombreux personnel doit enseigner et « accompagner » cet excédent d’étudiants avec des résultats nuls pour la plupart et au grand dam des meilleurs qui doivent travailler dans de très mauvaises conditions. En même temps, les « enseignants » ne peuvent guère que passer l’essentiel de leur temps à des activités absorbantes et non à la recherche et à la réflexion. Seul le CNRS maintient un véritable esprit de ce que furent les universités européennes. Même les professeurs titulaires sont accablés de tâches sans rapport avec leur vocation.

« Démocratiser » l’enseignement supérieur, c’est, par un système de bourses convenables, d’aides au logement sous diverses formes…, permettre à de nombreux jeunes que la faiblesse des moyens familiaux ou l’éloignement géographique empêcheraient de faire des études supérieures d’y accéder. Ce n’est pas de transformer l’université en une sorte de parking où s’installent provisoirement des jeunes inquiets sur l’avenir, timides devant la « vie active » et qui perdent du temps en attendant de comprendre que cela ne leur permet rien d’autres que des Bac+3 sans diplôme.

Il semble que les USA, peut-être aussi le Japon, la Chine et le Royaume-Uni, y parviennent mieux que la France dont le déclin, sur ce plan, paraît indéniable.

Remarquons que, même s’il est mauvais en son essence, car trop dogmatique et figé, le système napoléonien des grandes écoles a satisfait à ces nécessités : c’est ce qu’on a appelé « méritocratie républicaine » (en fait impériale).

Mais, justement, ce qui est conforme à ce modèle, on se garde bien de le massifier ! Ouvrir la fenêtre sur le monde, les sciences et l’esprit, ce n’est pas en transformant l’université en parking qu’on y arrivera !

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Comments (1)

  • MAGNE Répondre

    Bonjour . Nous savons qu’en France seuls ceux qui ont des diplômes ont des chances d’accéder à une vie meilleure .

    En Allemagne 4O % du grand patronat vient des B.E.P et des C.A.P . On dit au jeune qui entre à l’usine ( pas tous , bien entendu ) . Si tu " bosses " tu accéderas à la fonction de directeur . ( source Documentation française ) .

    En Angleterre avoir le baccalauréat relève du parcours du combattant  . Aprés c’est comme en Allemagne , les meilleurs accèdent au poste de Directeur s’ils " bossent " . Très peu font Oxbridge ( Oxford ou Cambridge ) ( source Documentation française ) .

    En France , il faut le Baccalauréat ( à 23 ans s’il le faut – je ne critique pas ceux qui l’ont eu trés tard , pour maintes raisons cela peut arriver ) , puis la maîtrise à 3O ans , puis on n’a plus qu’à se laisser aller , jusqu’à la retraite défendant becs et ongles ses acquis ) . Moi Monsieur , j’ai fait bac plus X . Parceque l’ébéniste , le mécanicien ( voitures , avions , navire..) est né avec le plan des sous-marins dans la tête .

    C’est bien de pouvoir pousser la jeunesse vers des métiers " d’avenir " , mais il faut surtout les payer à leur juste valeur . Travailler de ses mains n’est pas un déshonneur , au contraire .

    De plus , personne ne le fera , diminuer d’un tiers les charges des entreprises , et vous " verrez le bout du tunnel " que Giscard d’Estaing , en son temps " avait vu . Ne voyez aucune malice j’aime bien Giscard qui a eu la lourde tâche de s’atteler à la construction de centrales nucléaires ( une par mois à l’époque ) . MAGNE

     

    21 mai 2008 à 13 h 51 min

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