Démocratie directe à l’UMP: entre droitisation et démagogie

Démocratie directe à l’UMP: entre droitisation et démagogie

Voici maintenant près d’un an, Nicolas Sarkozy prenait la présidence de l’UMP. Depuis, on peut constater qu’il a imposé un style, fait essentiellement de démocratie directe. Faire décider les militants: voilà qui semble à la fois évident en démocratie et novateur dans la pratique!
Or, Nicolas Sarkozy, premier chef d’un grand parti élu au suffrage universel direct des militants, a réussi à imposer cette démocratie directe. Pour le moment, il est acquis que les militants décideront qui sera le prochain candidat de l’UMP à la mairie de Paris. Il est vraisemblable qu’une bonne partie des investitures importantes, à commencer par la désignation du candidat aux prochaines présidentielles, suivra la même métode.
Cette instauration de la démocratie directe n’était pas gagnée d’avance. D’une part, parce qu’elle est fort loin de la culture des anciens cadres de l’UDF et de DL qui ont contribué à fonder l’UMP et, d’autre part, parce que la plupart des anciens cadres du RPR sont chiraquiens et donc peu disposés à laisser le contrôle du parti au jeune rival. De façon générale, les cadres ne sont évidemment pas enclins à laisser leur voix se perdre au milieu de celles des militants.
En tout cas, le style Sarkozy est désormais marqué par ce dialogue direct avec les militants, sans l’intermédiaire des parlementaires ou des responsables des fédérations locales du parti.
On ne peut certes se défendre de l’impression désagréable que cet appel direct au peuple est une manœuvre, pour se passer de l’avis de personnes qui doivent pour la plupart leur carrière à Jacques Chirac ou qui, au moins pendant deux ans encore, doivent garder de bonnes relations avec lui. Par ailleurs, il est bien plus facile de manipuler des masses de quelques dizaines de milliers de militants que quelques centaines de cadres.
Mais, en même temps, cet appel au peuple pourrait avoir des conséquences pratiques, non seulement sur la vie de l’UMP, mais sur l’ensemble de la vie politique.
On le constate d’ores et déjà à Paris. Si certains se préoccupent d’éventuels bourrages d’urnes, c’est que le recrutement de nouveaux militants fonctionne à plein rendement. Car, autant l’intérêt d’adhérer à une structure où le pouvoir est verrouillé est limité, autant il est intéressant pour un Parisien de droite de dire son avis sur le candidat qui représentera la droite à Paris en 2008.
Du point de vue idéologique, si cette démocratie directe s’étend à l’élaboration du programme de l’UMP, nous pourrions assister à une nette “droitisation” du discours. Car l’immense majorité des militants de l’UMP est de droite et n’a jamais réellement adhéré aux idées de Jacques Chirac. Ce n’est pas pour rien que Nicolas Sarkozy a durci son discours en revenant au gouvernement: il veut rester le chef du parti majoritaire, ce qui signifie défendre des opinions majoritaires dans son propre parti, c’est-à-dire, en gros, la défense des libertés économiques, la défense de l’autorité et de la sécurité. Et, s’il va au bout de la logique, la défense des valeurs familiales (mais, ici, Nicolas Sarkozy a beaucoup de chemin à faire…).
Plus généralement, l’ensemble des formations politiques ou syndicales va être contraint d’en appeler également au peuple. Nous devrions donc assister à un “gauchissement” du discours du PS. Cela contribuerait à faire renaître un véritable débat politique, dont notre pays manque cruellement. Cela ne pourrait manquer d’influer sur la presse, qui devrait bien choisir son camp. De même, les organisations syndicales pourraient être contraintes de se compter sur le nombre de leurs adhérents et non sur leur prétendue “représentativité”.
Bref, cette utilisation de la démocratie directe pourrait contribuer à faire renaître une véritable vie sociale indépendante de l’État. Mais, il est vrai que, si l’on sort de ce rêve éveillé, on ne peut que constater que les institutions françaises ne supporteraient pas un tel foisonnement de corps intermédiaires. C’est pourquoi la conséquence la plus vraisemblable de cet appel au peuple réside dans un accroissement du mensonge au peuple et une extension illimitée de la démagogie!

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Comments (4)

  • Sarkophage Répondre

    Pour se rendre compte de l’incompétence caractérisée du petit Nicolas et de ses méthodes douteuses .. http://sarkostique.over-blog.com Sarkostique : le blog presque officiel de Sarkozy reconnu d’utilité publique Sarkophage

    3 septembre 2005 à 23 h 07 min
  • Adolphos Répondre

    Je pense que tout de même Chirac gouverne dans le sens désiré par la majorité des français. Que ceux ci soient aprés victimes de ses conséquences, c’est évident, mais c’est d’abord à eux de changer. Aprés tout, par exemple, si une grande majorité des français était contre l’immigration, les hommes politiques (élus, n’est-ce pas) ne pourraient pas se permetre d’en importer massivement..

    3 septembre 2005 à 0 h 41 min
  • Observateur Répondre

    “faire évoluer les mentalités marxistes de nos concitoyens,” Ou sutout la mentalité marxistes de nos hommes politiques de l’UMPS. C’est facile de toujours rejetter l’erreur sur peuple qui serait soi-disant stupide ou marxiste !

    2 septembre 2005 à 11 h 33 min
  • Adolphos Répondre

    Si le “peuple” est assez stupide pour croire au pére noel, est-ce la faute de la gauche ? Même Rocard reconnait dans le Figaro que “la gauche” et les français sont ignare en économie et bavarde sur des abstraction vide de sens.. Certes les hommes politiques sont trés laches en France. Tous le monde connait la situation réel, et depuis 15 ans, mais personne ne veut rien faire parce qu’alors évidement, le “peuple” votera contre. Quand à expliquer la réalité du monde, c’est à dire le libéralisme qui partout est adopté, et faire évoluer les mentalités marxistes de nos concitoyens, étant donné la censure qui existe…

    2 septembre 2005 à 0 h 59 min

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