Madoff et la retraite par répartition

Madoff et la retraite par répartition

Il est opportun que, grâce à Martine Aubry, le nom de Bernard Madoff soit enfin prononcé dans le débat sur le financement en France de la retraite par répartition.Celui qui a pu être qualifié de plus grand escroc de tous les temps a répondu, selon une source humoristique, aux enquêteurs qu’il avait puisé son idée dans le régime français de retraite par répartition !

Un tel système, dont le volume des engagements futurs comme des recettes immédiates dépend de facteurs étrangers à toute volonté individuelle, est intrinsèquement monstrueux.

Dans un système de retraites par répartition, le facteur démographique est déterminant.

Longtemps, il n’a posé aucun problème. Car, quand l’âge légal de départ à la retraite est fixé à 65 ans (en 1941), la durée de vie moyenne est inférieure à cette limite (en particulier pour les hommes) ! Si bien que la retraite obligatoire par répartition, imposée par le régime de Vichy, avec le concours de quelques renégats de la CGT, ressemblait un peu, à l’époque, à un système de « tontine » : seuls quelques exceptions survivantes percevaient réellement des droits à la retraite. Les au­tres – le plus grand nombre – étaient morts avant… Encore que, qui dit « tontine », dit en principe capitalisation (sauf pour les emprunts royaux, bien sûr !).

Aujourd’hui, quand l’espérance de vie à la naissance approche de 80 ans, on peut dire qu’on est passé de l’escroquerie par tontine (inventée par l’Italien Mazarin) à l’escroquerie à la Madoff (inventée par un autre Italien, Charles Ponzi).

Si, au lieu de la réformette que le gouvernement Fillon nous prépare, on voulait bien réfléchir à une réforme durable du financement des retraites, on commencerait par donner la préférence à un système qui fonctionne aussi indépendamment que possible de l’évolution démographique. Car, si l’on peut prévoir, à peu près, les évolutions de populations à 10 ou 20 ans, on ne le peut pas à 50 ou 100 ans.

Or, de tous les systèmes de financement des retraites, la répartition est le seul à dépen­dre principalement de la démographie. Les autres dépendent de l’évolution économique, dont la démographie n’est qu’un des éléments.

Répartition
et capitalisation

La capitalisation est la seule alternative à la répartition. Mais il en existe toutes sortes de variantes : collective ou individuelle, obligatoire ou facultative. La mutualisation pouvant se faire à un niveau ou un autre, par exemple la profession ou l’entreprise, comme avec les « fonds de pension ». Et l’obligation pouvant porter sur tout ou partie des droits et des charges correspondantes.

Finalement, replacé sur le terrain de la capitalisation, le financement de la retraite ne serait rien d’autre qu’une question d’épargne, libre ou contrainte, fiscalisée ou défiscalisée, garantie ou non.

Je sais bien que la répartition permet une large redistribution. Mais rien n’empêcherait d’en faire autant avec la capitalisation. Avec la répartition, la redistribution s’effectue forcément entre les générations. Avec la capitalisation, la redistribution s’effectue éventuellement entre les catégories sociales.

Avec la capitalisation toutes les variantes sont possibles, du plan le plus individuel (épargne libre) au plus collectif (pensions égales pour tous, voire réservées aux plus pauvres).

Avec la répartition, sans provision, on est sur le terrain de l’escroquerie, avec garantie de l’État.

Dans ces conditions, nos dirigeants feraient mieux de se préoccuper du passage d’un système à l’autre (réflexion parfaitement menée par Jacques Garello et Georges Lane dans leur livre publié par Contribua­bles Associés : « Futur des retraites et retraites du futur »).

En citant Bernard Madoff, Martine Aubry a évidemment voulu offenser Nicolas Sarkozy. Mais savait-elle que c’était le principe même de la retraite par répartition qu’elle insultait ?

Nonobstant le fait qu’il s’agisse certainement d’un acte manqué, et malgré les égards dus à notre président de la Républi­que, il convient donc de féliciter Madame la Première secrétaire du parti socialiste pour cette attaque en forme d’aveu.

C’est pourquoi je propose que, chaque année, un « prix Ber­nard Madoff » soit désormais attribué aux plus méritants de nos politiciens, c’est-à-dire aux plus zélés dans l’ordre de la redistribution. Ceux qui rançonnent le mieux les générations à venir… n

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Comments (3)

  • Jaures Répondre

    L’escroquerie est de comparer le système de Ponzi avec les retraites par répartition. Cela n’a strictement rien à voir.

    Madoff payait des intérêts fictifs avec les nouveaux capitaux qu’on lui confiait. Le problème a surgi quand tous les investisseurs ont demandé leurs fonds. Dans la retraite par répartition, les cotisations payent les retraites. On serait sur un système Madoff si tout le monde demandait à partir en retraite demain, quel que soit son age, avec une pension complète. C’est évidemment absurde.

    Le moyen de sauver les retraites est d’élargir l’assiette de cotisations et il n’est pas immoral de penser qu’une part plus importante du PIB soit consacré aux retraites, comme a augmenté la part liée à la santé.

    Les pays qui ont mis en place le système par capitalisation ont le plus faible taux de remplacement et l’age le plus élevé de départ à la retraite. Par ailleurs, la crise a ruiné les pensionnés qui ont vu leurs revenus s’effondrer de 20à 50% !
    En Angleterre, en Irlande ou aux USA, les septuagénaires sont repartis à la recherche d’un emploi.

    Un monde de rêve pour Alain Dumait !

    10 juin 2010 à 15 h 30 min
  • pseudo Répondre

    "
    Car, si l’on peut prévoir, à peu près, les évolutions de populations à 10 ou 20 ans, on ne le peut pas à 50 ou 100 ans.

    Or, de tous les systèmes de financement des retraites, la répartition est le seul à dépen­dre principalement de la démographie. Les autres dépendent de l’évolution économique, dont la démographie n’est qu’un des éléments.

    "

     

    Ha évidemment…car on peut prévoir l’évoluation économique dans 10 ou 20 ans, en d’autre termes sous prétexte  qu’on ne peut pas prévoir l’évolution démographique dans 50 ans on doit passer à un système basé essentiellement sur l’économie dont les capacité de prévision sont quasi nulles…ca c’est de l’argumentation.

     

    En général lorsqu’on utilise un argument il faut que cet argument soit "discréminant": en bref je peux l’appliquer à une idée mais pas à l’autre ce qui fait qu’une idée peut se révéler meilleure qu’une autre…

    Par contre une combinaison repartition/capitalisation mais en donnant de vrais arguments, en gros tout le contraire ce que j’ai lu ici…

    10 juin 2010 à 10 h 11 min
  • ozone Répondre

    A coté de la plaque
    Le probléme est la concentration de la richesse avec son corollaire de spéculation dévastateur,
    Depuis plus de vingt cinq ans la part de l’impot des sociétés par rapport au PIB n’a céssé de baisser.
    Les fonds de pensions sont une des causes du désastre actuel ayant favorisé la croissance monstrueuse des circuits financiers.
    La répartition irrigue l’économie réelle,les vieux n’épargnent pas.

    9 juin 2010 à 22 h 17 min

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