Réflexions sur « l’ouverture » du gouvernement

Réflexions sur « l’ouverture » du gouvernement

Les hommes politiques sont avant tout… des hommes politiques ! Comme le faisait remarquer Georges Pompidou, aucun n’est jamais mort d’une indigestion de voix ! En conséquence, ils veulent gagner leur élection avec le plus grand nombre possible de suffrages, et demeurer le plus longtemps possible au pouvoir.

C’est en partant de cette fort triviale observation qu’il convient d’analyser la constitution du premier gouvernement de Nicolas Sarkozy.
Il aurait pu faire l’ouverture à droite, ou bien constituer, pour commencer, un gouvernement de techniciens… Mais ce n’est pas comme ça qu’il allait gagner les élections législatives des 10 et 17 juin prochains. Au plan parlementaire, son adversaire demeure le parti socialiste. Tout ce qui l’affaiblit renforce sa position politique. Et si des hiérarques socialistes se sont ralliés dès le 7 mai, comment continuer à diaboliser le nouveau chef de la droite ? Son image gagne en finesse et perd en brutalité…

Cette « ouverture » politique, au lendemain d’une élection présidentielle, est d’ailleurs un grand classique de notre vie politique. De Gaulle lui-même la pratiqua en 1945, puis en 1958, avec des ministres comme Pierre Pflimlin et Guy Mollet (qui venaient avec quelques « amis »). François Mitterrand la renouvela en 1988, avec une poignée de ministres « barristes ». Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing considéraient que c’était entre les deux tours qu’il fallait élargir aux centristes. On sait que Nicolas Sarkozy était prêt à le faire, mais François Bayrou avait « pris la grosse tête »…

On remarquera quand même qu’en 1981, François Mitterrand va aux élections générales sur une ligne « d’Union de la gauche ». Le nouveau chef de l’État, électoralement, aurait pu envisager d’y aller à son tour sur une ligne « d’entente à droite », ce qui aurait permis de lever sans attendre de nombreuses incertitudes sur les chances réelles de redressement du pays avec un gouvernement « d’ouverture ». Mais il n’y a pas de parallélisme entre les deux situations : François Mitterrand avait la sympathie des médias sur sa ligne politique tandis que Nicolas Sarkozy ne l’aurait certainement pas eu sur une ligne « d’entente à droite ».

Car les médias sont au cœur de la stratégie de notre nouveau président de la République. On peut compter sur lui pour occuper toutes les lucarnes, toutes les ondes et toutes les colonnes, ne laissant à l’opposition de gauche qu’un petit nombre de médias de deuxième catégorie du point de vue de leur audience (Canal+, les radios du service public, « Le Monde »…). C’est à se demander si, quand il a dit être le candidat du peuple, il ne pensait pas « candidat des people »…

On sent qu’il y a déjà une sorte d’accord avec la gent médiatique : ce gouvernement ira encore plus loin que ses prédécesseurs dans la voie du social compassionnel (la première visite du nouveau Premier ministre a été pour un foyer de femmes battues, presque toutes d’origine africaine…), mais, comme il a répété sur tous les tons qu’il fera ce qu’il a dit, il espère que les médias le soutiendront, y compris sur ses réformes économiques.

En vérité, la véritable opposition réside d’ores et déjà dans les officines syndicales. Et le moment de vérité viendra, dès cet été, avec la mise en place annoncée et confirmée d’un service minimum dans les entreprises publiques de transport. On peut compter sur François Fillon pour offrir autant qu’il le pourra des contreparties aux syndicats. Mais si ceux-ci se sentent assez forts pour aller à l’affrontement, ce pourrait être, pour la majorité nouvelle, la première épreuve du feu.

Résumons-nous. Nicolas Sarkozy a demandé à son gouvernement de mettre en œuvre son projet présidentiel. Celui-ci comporte des propositions intéressantes mais n’est de nature ni à permettre un développement économique brillant, ni à répondre aux désordres de toutes sortes résultant de trente ans de laxisme en matière d’immigration. Le nouveau chef de l’État n’a pas pris d’engagement fort sur la réduction de la dette ou sur la réduction des dépenses (si ce n’est sur la réduction du nombre des fonctionnaires). En matière d’immigration, il n’envisage qu’un infléchissement, sous la forme d’un durcissement des conditions du regroupement familial, ce qui est bien, mais tout à fait insuffisant.

« Toujours, l’inattendu arrive ». C’est à ce moment-là, qui peut venir très vite, qu’on pourra juger notre nouveau gouvernement. Et qu’on verra si « l’ouverture » a été seulement un bon coup politique, ou… une mauvaise affaire pour la France.

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Comments (3)

  • Jean-Claude THIALET Répondre

    26/05/07 – Bien vu, EIFF ! Une fois de plus la "droite la plus bête du monde" (elle fait pendant à la gauche la plus archaique du monde, expression dont je revendique la paternité), et particulièrement la "droite nationale" qui a rallié Nicolas SARKÖZY par peur de Marie-ségolène ROYAL, aura été la cocue des urnes… Bon dimanche, cordialement, Jean-Claude THIALET

    26 mai 2007 à 19 h 12 min
  • EIFF Répondre

    Sarkozy, élu par l’électorat de la droite nationale et patriotique, reprenant à son compte un discours musclé ancré à droite et parfois trés libéral, joue l’ouverture, l’ouverture à gauche évidemment, la campagne marketting pour la présidentielle est belle et bien terminée, dorénavant tout les coups fourrés sont permis pour reculer et retarder les vraies réformes. Certains rêvaient d’une Margaret Tatcher ou d’un Rudolf Giuliani pour défendre l’indépendance française et rétablir la sécurité, ce seront  finalement le socialiste Kouchner partisan de l’entrée de la Turquie et immigrationniste aigü et la chiraquienne Alliot-Marie qui s’en chargeront. Encore un ou deux quinquénat et la France sera dénitivement submergée par l’immigration de peuplement.

    25 mai 2007 à 14 h 30 min
  • Jean-Claude THIALET Répondre

    24/05/07    – "Les 4 Vérités"

    La lecture de l’article d’Alain DUMAIT n’a fait qu’augmenter le "sarkôscepticisme" d’un électeur qui, lassé de voter en vain  "blanc" ou "nul" au second tour, s’était décidé à l’abstention. Je partage parfaitement l’analyse du directeur des "4-Vérités" : le nouveau oétrsident de la Cinquième Publique s’efforcera, tout au long de son quinquennat, de régner, avec l’aide se ses amis capitaliste, de régner non sur les coeurs, mais sur les médias. Et les seuls adversaires qu’il aura à affronter seront, certes les syndicats, comme le relève Alain DUMAIT, mais aussi les Associations de tous poils qui ont des capacités de mobilisations. C’est là que les électeurs de la vraie droite qui ont rallié le panache sarközien en s’imaginant avoir trouvé en Nicolas SARKÖZY un véritable homme de droite, devront attendre le nouveau président.

    Sera-t-il une véritable Margaret THATCHER, laquelle a osé affronter (avec un plein succès, faut-il le rappeler) les syndicats britanniques autrement puissants que leurs homologues français ? Ou se dégonflera-t-il comme une véritable baudruche, façon général BOULANGER, dès la première manifestation ? Comme il l’avait à l’automne 2005 lors des émeutes de banlieues(1), faute d’avoir eu le courage de donner des ordres fermes comme devait le faire, en 2005, Madame le gouverneur de Louisiane pour mettre fin aux pillages qui avaient suivi les inondations catastrophiques (2). Pourtant, concernant les syndicats et les associations, Nicolas SARKÖZY, pour peu que les 10 et 17 juin lui apportent une chambre introuvable, aura un excellent moyen de neutraliser tant les syndicats que les associations : leur couper les vivres. Ne sont-ce pas les contribuables (et non les membres) qui financent, le plus souvent à l’insu de leur plein gré  ? Sans que jamais l’Etat se penche sur leur gestion et demande des comptes à leurs dirigeants ! Sans qu’il les traîne devant la Justice chaque fois qu’ils bafouent les lois, notamment en matière de liberté du travail …

     

    (1) Rappel : régulièrement, Nicolas SARKÖZY se félicite que ces émeutes n’aient

    (2) rappel : le gouverneur de Louisiane avait indiqué devant micros et caméras qui avaient passé son message en boucle "J’ai donné l’ordre aux Gardes nationaux de tirer sur les pillards, et j’espère qu’ils le feront". Et tout était rentré très vite dans l’ordre. Tout comme, fin 2005, un simple jugement condamnant les syndicats à de très fortes astreintes par jour de grève, avait mis fin à une grève des transports dans à New-York et dans l’Etat éponyme …

    24 mai 2007 à 16 h 34 min

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